Ce soir, j'avais décidé d'être un gentleman. Je m'étais dépêché de fermer la boutique, plus tôt que d'habitude, pour rentrer à mon manoir et préparer quelques petites choses. Une surprise pour Belle, en réalité. Nous ne parlions guère ces temps-ci, par manque de temps et par manque d'envie de mon côté. Je sentais une certaine lassitude se creuser et je ne souhaitais pas qu'elle s'en aille maintenant que je l'avais retrouvé... Oh ! Ca aurait été tellement plus simple qu'elle parte, pour elle, pour moi... Mais malgré tout, je l'aimais, je ne pouvais pas le nier. Et ici, à Storybrooke, je ne devais pas craindre de perdre mes pouvoirs en l'embrassant ! Tant mieux. Si je l'avais rencontré plus tôt, tout aurait été tellement plus simple... Si je l'avais rencontré avant de perdre mon fils, nous aurions tous pu vivre là-bas. Je m'étais une fois demandé si ça aurait été une bonne chose. Enfin... Tout cela n'était plus possible désormais et il était hors de question que je parle de Bae à qui que se soit, même à Belle. Ce secret resterait terré au fond de moi jusqu'à ce que je le retrouve. Personne n'avait besoin de savoir et personne n'avait jamais su. Oh... Bien sûr, quelques-uns savaient que j'avais eu un fils un jour – ils étaient très rares – mais à leurs yeux, ce fils était mort. C'était ce que j'avais dit, d'une certaine manière. Lorsque l'on dit « disparu », c'est clair dans l'esprit des gens. On pense tout de suite au plus macabre. Passons ! Ce soir, je devais légèrement mettre Bae de côté. La potion que je concoctais pour pouvoir quitter Storybrooke était presque prête. Il ne restait que quelques autres ingrédients et manipulations à faire avant que tout soi fin prêt. Je devais également trouver un cobaye pour tester cela. J'avais déjà ma petite idée en tête, mais... Chut... Ça restait un secret, pour l'instant.

Vêtu d'un beau costume noir – dont la cravate était mauve – je plongeais quelques fleurs dans un vase que je posais au milieu de la table de la cuisine, mis la table et préparais le dîner. Je savais cuisiner, en effet ! Après tout, n'avais-je pas élevé Bae tout seul jusqu'à ce qu'il soit honteusement arraché à moi par un tourbillon ? Un enfant de six ans ne cuisine pas tout seul, j'avais appris, et je ne me débrouillais pas mal du tout ! Je ne savais pas exactement ce qu'aimait Belle – damne ! Je faisais un piètre petit ami, mais la nourriture était le cadet de mes soucis et nous parlions peu elle et moi. Et puis, pouvais-je ma qualifier de petit-ami ? Rien n'était vraiment officiel à part quelques baisers. Ce n'était pas plus mal que rien ne soit officiel... Enfin, ce soir je comptais me rattraper un peu. En espérant qu'elle serait contente. Je savais combien il était dur de satisfaire les femmes : elles voulaient toujours plus d'efforts, plus de cadeaux, plus de ceci, plus de cela... Quand on leur offrait quelque chose, elle voulait encore une chose supplémentaire. J'étais presque sûr que Belle allait remettre mon « mauvais côté » ou ma « lâcheté » en cause ce soir, à un moment ou un autre, malgré ce petit repas que je lui concoctais. Et j'étais sûr que, malgré le calme et la patience dont je faisais toujours preuve, j'allais finir par m'énerver. Peut-être qu'il n'y aurait pas de dispute ce soir, peut-être étais-je négatif, mais je voyais ça venir gros comme une maison.

Enfin... En attendant, je cuisinais italien. Il paraissait que l'Italie était le comble du romantisme, avec Venise et ses gondoles. Je n'avais aucune envie de voyager, mais je savais que Belle adorait les aventures. Elle s'y plongeait dans les livres et rêvait sûrement de voyager. Au moins une chose que je savais sur elle ! Il n'y avait pas trop de quoi se vanter, mais au moins n'était-elle pas une parfaite inconnue à mes yeux. Pendant que les Penne aux crevettes cuisaient, je préparais une sauce tomate à côté. Et sans magie, s'il vous plaît ! Elle n'aurait vraiment pas de quoi se plaindre ! Je mis la table en me servant des plus beaux couverts que je possédais dans mon argenterie et versais un peu de vin rouge dans les verres avant de poser la carafe transparente à côté du vase remplit de fleurs aux bonnes odeurs. J'entendis me postais alors devant la fenêtre, appuyé sur ma canne, et dès que je vis Belle arriver, je lui ouvris la porte et m'inclinais légèrement devant elle avant de prendre un charmant accent italien :

« Entrez, Signora. je lui fis un charmant sourire et la laissais entrer avant de retourner à la cuisson de mes pâtes. Peut-être aurais-je dû l'embrasser ? Je n'étais pas expert en la matière ! Rien de tel qu'un bon repas après une bonne journée... A-t-elle été bonne ? » je me surprenais moi-même de ma gentillesse. Mais après tout, il n'y avait qu'avec Belle et Bae que j'étais aussi prévenant. Je me tournais vers elle, interrogateur.

J'étais soulagé, elle semblait contente. Je me flattais donc de mes efforts : pour le moment, ils portaient leurs fruits ! Je lui fis un petit sourire satisfait avant de retourner à la cuisson de mes pâtes et ma sauce tomate. Ca n'allait pas tarder à être prêt, et la soirée s'annonçait douce. Peut-être m'étais-je fait des idées au sujet d'une future dispute ? Sans doute, c'était dans ma nature de prévoir tous les scénarios possible. Et en prévoyant le pire, il ne pouvait rester que le meilleur, n'est-ce pas ? Je n'étais pas un homme pessimiste, ni même trop réaliste... Mais parfois imaginer le pire pouvait avoir du bon, dans certaines situations. Et là, c'était le cas. J'éteignis le feu sous la casserole qui contenait les pâtes, les essorais au-dessus de l'évier et versais la sauce tomate dedans avant de mélanger. Si j'avais passé une bonne journée ? Ma foi, elle n'avait été ni bonne, ni mauvaise. Une journée banale, sans aucun événement majeur notable. Normalement, depuis que le sort était brisé, on se précipitait dans ma boutique sans état d'âme, comme dans un moulin, mais aujourd'hui, rien, pas un chat. J'avais pu tisser de l'or à foison et passer un peu de temps sur la potion qui me permettrait de quitter Storybrooke à la recherche de mon fils. Je pouvais donc dire que c'était une bonne journée, en effet... ! Je posais la casserole sur la cuisinière, m'approchais de la table et tirais galamment une chaise à Belle.

« J'ai passé une bonne journée. » répondis-je tout simplement à la question qu'elle m'avait posée en retour de la mienne. Je saisis son assiette et lui servis tout d'abord un peu de salade avant de faire de même pour moi et de m'asseoir en face d'elle. Je n'avais jamais été brillant pour les conversations. Elles se limitaient en général aux affaires que je passais avec les gens. Parler de la pluie et du beau temps, pourquoi faire ? Je n'aimais pas parler de moi non plus, et m'intéresser à autrui... Je le faisais indirectement, en m'informant à ma manière. J'étais donc quelqu'un de très fermé et à peine assis que je ne sus que dire. Je posais doucement ma canne contre ma chaise. « Rien n'est trop parfait pour toi... Oh d'ailleurs, si tu as besoin de quelque chose, n'hésites pas à me demander. Je sais que ton métier commence à te rapporter ton propre argent mais je suis là en cas de besoin. » je faisais bien sûr référence aux habits, à la nourriture, au logement mais aussi à tous autres petits plaisirs qu'elle aurait souhaité se faire. J'étais riche, après tout, je pouvais lui obtenir tout ce qu'elle voulait ! Mais je doutais qu'elle m'en fasse la demande. Je baissais les yeux sur mon assiette et, faute de trouver autre chose à dire, je prononçais un « Bon appétit. ».

Je commençais donc à manger, mes yeux allant de Belle à ma salade. C'était tellement plus simple lorsque nous étions dans le monde des contes et lorsque j'étais le Ténébreux à part entière... J'avais encore toute mon excentricité, je pouvais me permettre quelques blagues vaseuses, quelques rires amusés, et quelques mimiques bien particulières. Mais en tant que Mr. Gold... Les choses étaient plus délicates. Je n'avais pas exactement le même caractère... Que dire ? Je préférais lui laisser le monopole de la discussion. Qu'elle me parle de sa journée, de ses amies, de ses occupations... Mais rien n'était si simple. Tant qu'une certaine confiance ne régnait pas entre nous, les discussions seraient limitées, la gêne présente, et c'était fort désagréable. Pourtant, je ne faisais rien pour améliorer la situation... Enfin... ''Rien''... Je venais quand même de lui préparer un dîner italien ! Si ça ce n'était pas de la bonne volonté... ! « La sauce n'est pas trop aigre, j'espère ? » Parler de cuisine... Il fallait tomber bien bas, quand même. Quelque chose clochait dans notre ''couple'', mais nous ne voulions pas poser le doigt dessus, de peur de casser le lien fragile qui nous unissait.

Le rire qu'elle émit me froissa légèrement. Inutile de se moquer, même si la discussion était pitoyable ! Mais je me contentais de la fixer avec une neutralité déconcertante. J'avais toujours été très calme dans les couples que j'avais pu former, surtout avec Milah. Elle avait beau se moquer de moi, me rabaisser, m'humilier en publique, je restais toujours silencieux et n'attisais pas les disputes. Inutile de jeter de l'huile sur le feu. Une fois le rire passé, elle s'excusa. Je fis un vague haussement d'épaule, oui, je parlais de cuisine, en effet, puisqu'il fallait bien parler de quelque chose ! Au moins pouvais-je me flatter d'être un bon cuisiner pour qu'elle trouve la salade délicieuse. Lorsqu'elle rouvrit la bouche, je me préparais psychologiquement à une position défensive ; je sentais venir la discussion tant repoussée. Il fallait bien que ça arrive, tôt ou tard, et de nous deux, c'est toujours elle qui osait prendre la parole pour mettre clairement le doigt sur ce qui n'allait pas. Moi, je ne le faisais jamais. C'était un peu... Lâche. Oui, lâche ! Cet adjectif revenait tellement souvent dans ma vie que j'allais devoir m'en accoutumer. Si seulement ils comprenaient... Ce n'était pas de la lâcheté, c'était l'expérience. J'avais assez appris à mes dépends pour fermer mon cœur à toutes personnes souhaitant y pénétrer. J'étais un monstre, une bête, et je ne parlais pas seulement de mon ancien physique de Ténébreux, mais... De mon moi en règle générale. Passons. J'avais de nombreux défauts, et tout le monde le savait. D'ailleurs, Belle était l'une des seules à ne pas voir que la bête en moi. Elle avait sans doute tort, car je n'avais rien d'autre à lui offrir à part la solitude et les ténèbres.

Comme je l'avais prévu, Belle commença un petit discours sur les problèmes majeurs de notre relation. Oui, autrefois... Autrefois, c'était différent. Mais autrefois, je l'avais rejeté, par peur de perdre mes pouvoirs. Ce n'était pas par amour pour eux, mais par amour pour mon fils, surtout. Sans pouvoir, impossible de venir à bout de mon plan pour le retrouver dans ce monde. Je ne pouvais le permettre, pas pour une amourette. Enfin une amourette... Elle était possiblement mon amour véritable. Cela dit, plus nous passions du temps ensemble, plus je venais à en douter. Pourquoi ? Nous passions notre temps à nous embrouiller, elle se fâchait au moindre de mes agissements lorsqu'ils étaient « vils » et je ne faisais aucun effort pour changer ma nature. Je ne pouvais pas changer ! Je devais d'abord retrouver la personne qui comptait le plus pour moi, mon fils. Mais elle ne pouvait pas savoir, je ne lui disais strictement rien.

D'un certain côté, je la trouvais touchante. Elle avait mal pour moi ? Il ne fallait pas. Si je lui disais comment je m'étais fait ça, sa compassion se transformerait rapidement en mépris. Encore un acte de lâcheté penserait-elle à tort. Car ce n'était pas par lâcheté que je m'étais moi-même broyé la jambe. Non... C'était par amour pour un fils que je ne connaissais pas encore. On avait prédit que jamais je ne le connaîtrais si je partais à a guerre, car je devais mourir en combattant. J'avais moi-même été abandonné par mon père, et ça faisait très mal. Impossible que la même chose arrive à mon fils. C'était pour cette raison que je m'étais fait du mal. Mais personne ne le savait... Et tout le monde me voyait comme un couard. Alors mieux valait que Belle garde ses bons sentiments, car de toute façon, je ne jouerais jamais franc jeu avec elle. Ce n'était pas mon point fort. Je ne mentais jamais, je détournais simplement la vérité en jouant sur les mots, là était toute la différence. Elle plongea ses yeux dans les miens et je les vis se remplir de larmes. Mon cœur se serra. Juste un peu. Je n'aimais pas la voir malheureuse, je ne voulais que son bonheur.

Stop. J'avais déjà prononcé cette phrase, et elle ne s'adressait pas à Belle, mais à mon fils. Ne mélangeons pas les répliques avec n'importe quelle situation. Je ne devais pas me montrer trop tendre même si la voir larmoyante me fendait le cœur. Je voulais vraiment qu'elle se sente à l'aise, mais ce n'était pas possible. Et je n'avais plus mon côté excentrique pour m'aider à la faire rire. D'ailleurs, j'étais un peu agacé de ce reproche. Préférait-elle réellement mon ancien ''moi'' ? Je devais dire que moi aussi, je le préférais... Je pouvais me permettre tellement plus de chose, sans me poser de questions. C'était différent ici. Tout était différent. Je plissais légèrement les sourcils suite à sa dernière phrase. Je répondis sans réfléchir, du tac au tac :

« Eh bien, justement, peut-être que si tout va si mal, c'est qu'au final, je ne tiens pas à toi. c'est après avoir prononcé ces mots que je me rendis compte de ce que je venais de dire... Je me repris aussitôt. Ce n'est pas ce que je voulais dire, je suis désolé, Belle... Mais, comprends-tu, je ne suis plus exactement le même qu'autrefois... Ici, je fais des efforts, non... ? pas bien gros, mais tout de même, un peu de reconnaissance ! Légèrement plus agacé, mais gardant un ton toujours très calme, je repris :Je ne peux pas changer en un claquement de doigt pour répondre à tes désirs. Il me semble que je ne t'aie pas forcé à la main en te proposant de venir vivre ici, que je n'ai pas forcé le passage pour t'embrasser, ... Tu savais parfaitement dans quoi tu t'embarquais en ... Étant avec moi... je ne pouvais pas exactement nous définir comme un couple. Alors... Plus de reproches, s'il te plaît. Pour le moment, c'est comme ça, il faut faire avec... j'insistais sur le « pour le moment ». Car peut-être après avoir retrouvé mon fils, les choses seraient différentes... Mais c'était un gros peut-être, car tout dépendrait de la réaction de Bae. Je l'imaginais négative. A raison, sans doute... Je me levais en m'appuyant sur ma canne et m'avançais jusqu'à elle, frôlant sa joue de mes doigts. J'ai des priorités, et tu n'en fais visiblement pas partie, voilà tout. Je suis désolé, Belle. Je... Je t'aime, mais... C'est comme ça. » C'était vrai, je l'aimais. Mais ma priorité était mon fils. Fils dont elle ignorait l'existence – ou qu'elle croyait mort. C'est pourquoi elle allait sans doute s'imaginer que mes priorités étaient mes contrats et ma magie... Grand bien lui fasse. Mais j'étais sincèrement désolé.

Je m'approchais de la casserole pleine de pâtes et la posais sur un dessous de plat. Aurait-elle encore faim après notre discussion ? Aucune idée, nous verrons bien.

Comme je m'y attendais un peu après de telles paroles, Belle continua sur la lancée de notre discussion. Je poussais un soupir inaudible. Moi qui pensais faire un petit repas en sa compagnie, et peut-être regarder un film avec elle pour finir la soirée avant d'aller au lit... C'était raté. Je restais debout, appuyé sur ma canne, la regardant. Je savais parfaitement que je l'avais blessé, et j'en étais désolé. Vraiment désolé... Mais il semblait que ce soit le quotidien de notre couple : se blesser mutuellement. C'était fatiguant, lassant et cela nous faisait dépenser de l'énergie pour peu de chose, au final. Je n'avais jamais su lui montrer combien je l'aimais, dans le monde des contes, et ici, c'était la même chose. A croire que mon cœur de Ténébreux ne pouvait pas contenir qu'une seule personne à la fois. Et cette personne, c'était Bae, la place était déjà prise. Belle semblait vraiment remontée contre moi, maintenant... Je craignais le pire. Qu'allait-elle bien pouvoir faire ? Partir ? C'était bien possible. Et je le lui conseillais avant qu'elle ne se brûle encore un peu plus à notre flamme amoureuse. Mais, doucement, elle sembla se calmer un peu. Je la regardais, aussi impassible que possible, même si mes yeux brillaient d'une infinie lassitude mêlée à une peine toute aussi grande. Elle reprit la parole d'une voix qui semblait posée. « Si c'est ce que tu veux. » Bien... Elle me laissait le choix pour que je passe encore une fois pour le sale type qui l'avait mise à la porte ? Je n'avais pas envie de passer pour un lâche une fois encore, et j'avais été trop heureux de la retrouver, contrairement à ce qu'elle pensait. Je n'allais pas la lâcher comme ça, même si c'était le chemin le plus simple pour nous deux. Mais sans elle, je me rendais compte que j'étais tout seul. Comme toujours, en fait, ça ne changeait pas les habitudes !

Elle me fixa alors droit dans les yeux. Ses pupilles ne brillaient plus, elle avait repris contenance. Je n'aurais pas supporté de la voir pleurer... Cela me fendait le cœur, car c'était moi qui causais ses larmes. Selon elle, je devais faire un choix. Pourquoi moi ? J'allais encore le briser le cœur... Sa première solution était tentante. C'était ce que je voulais : qu'elle reste. Mais je ne pouvais pas lui parler... Ou alors lui parler de choses futiles. Hors de question que je m'engage dans des discussions sur mes projets. Et dès que j'aborderais la magie, elle serait mécontente, j'en étais sûr. Car ma magie n'était pas bonne et ne visait qu'à faire le mal et semer des discordes. Soit elle partait... Ce qui lui serait grandement libérateur. Elle ne souffrirait plus. Mais je ne voulais pas qu'elle parte... Dans le monde des contes, le même dilemme s'était imposé : je l'avais laissé partir et elle était revenue de son plein gré. Mais cette fois, si je la laissais de nouveau filer, elle ne reviendrait pas. Je la croyais quand elle me le disait... J'eus curieusement envie de pleurer. C'était un peu stupide et faible de ma part. Mais je savais que ce serait mieux pour elle qu'elle s'en aille. Depuis quand tu penses aux autres, Rumple ? souffla la voix de a conscience.

Belle prit mon visage entre ses mains délicates et me caressa doucement la joue. Jadis, j'aurais été surpris que quelqu'un veuille me toucher, car ma peau était plutôt laide, et mon teint verdâtre. Je l'étais ici aussi, bien que j'ai une apparence normale. Je n'avais pas eu de contact humain aussi... Gentil, aussi doux, depuis très longtemps. J'avais oublié ce que cela faisait. Elle voyait vraiment du Bon en moi... Je trouvais ça touchant et stupide. Car je ne voyais rien de Bon dans mon cœur à part des morceaux de l'homme que j'avais été avant de devenir le Ténébreux. Ses lèvres touchèrent les miennes, délicates. Je n'eus pas le réflexe de lui rendre son baiser et de m'y accrocher. Elle lâcha mon visage et se recula, attendant mon verdict. Elle me prenait par les sentiments... Que devais-je faire ? Je n'en avais pas la moindre idée, mon avis était partagé. La laisser partir pour qu'elle ne revienne plus jamais, ou bien la garder auprès de moi, au risque que nous nous blessions – et surtout elle – un peu plus ? Je décidais de plaquer les cartes sur la table afin que, au final, ce ne soit pas moi qui prenne une décision, mais elle. De son plein gré. Elle déciderait comme une grande fille, ce n'était plus à moi de choisir pour elle, je n'étais plus son « maître », comme je l'avais été au royaume des contes alors qu'elle était gardienne de mon château.

« Oh, Belle... J'aimerais tellement que tu comprennes que je ne peux rien te dire. je m'avançais d'un pas, pour être un peu plus proche. Mon ton et mon visage exprimaient un regret véritable. Je poussais un discret soupir, cherchant mes mots. J'étais plutôt habile avec ceux-ci d'ordinaire, mais je semblais perde une partie de mes moyens en sa compagnie. Je posais ma main sur son épaule et l'attirais contre moi afin de la serrer dans mes bras. Ma priorité... les mots jaillirent soudain tout seuls de ma bouche : Ma priorité, c'est évidemment la magie et le pouvoir que cela m'apporte. je la lâchais et me reculais d'un pas. Mon visage s'était légèrement durci, presque impitoyable. Le choix serait sien, mais au final, je faisais tout pour qu'elle s'en aille. Je reculais d'un pas supplémentaire. Le même scénario que dans le monde des contes se dessinait. Mais je me radoucis aussitôt, incapable d'aller plus loin. Grâce à la magie je... je fis un geste évasif de la main. J'aurais tant aimé me confier à elle. Une personne aurait pu me soutenir... Mais je ne pouvais pas. Les mots se bloquèrent dans ma gorge et je lui fis un pâle sourire d'excuses. J'atteindrais le but que je me suis fixé. C'est tout ce que je peux te dire, Belle. Je suis désolé... » le dernier mot n'était qu'un murmure et je baissais piteusement la tête.

J'étais plutôt contradictoire dans ma façon d'agir et dans mes paroles, mais mon avis sur la question était exactement le même : contradictoire. Je voulais qu'elle reste, mais, d'un autre côté, tout aurait été plus simple si elle était partie... Je relevais la tête mais n'osais pas la fixer dans les yeux, fuyant son regard comme un lâche. Je me détournais finalement d'elle, attrapais la casserole pleine de pâtes et en jetais le contenu à la poubelle. Quel gâchis... Mais je supposais que, maintenant, le repas était fichu de toute façon. Je me retournais vers elle, toujours l'air aussi calme. A l'intérieur, je bouillonnais de trop de sentiments : colère, frustration, tristesse, regrets...

« Je ne veux pas te perdre, Belle. Mais avec moi, tu ne feras que te brûler encore, et encore à la même chandelle. Je... Je ne peux rien t'apporter mise à part la solitude et les ténèbres. » l'une de mes phrases favorites, celle-là aussi. Je l'avais servie à Cora, une fois. Car c'était véridique.

L'énervement se lisait dans le ton dans sa voix ainsi que sur son visage. Je la comprenais parfaitement... Après tout, je ne savais pas ce que je voulais, alors qu'elle semblait le savoir. Et elle souhaitait rester avec moi. Mon cœur fit un petit bond incontrôlable. Au fond, moi aussi je voulais qu'elle reste, parce que je l'aimais malgré toutes les horreurs que je pouvais lui dire... Et elle restait. Je l'admirais énormément pour ça. Elle arrivait à me supporter au quotidien et c'était un exploit phénoménal. Je restais muet suite à sa petite explosion, je ne pouvais rien lui dire même si ma langue brûlait d'envie de se délier afin de se confier à elle. Mais non. Ca aurait été une grave erreur, je le sentais au plus profond de moi. J'avais décidé que personne ne saurait avant que je ne retrouve Bae, alors personne ne saurait, point final, pas la peine de tergiverser. Faire confiance à quelqu'un, disait-elle... Mais c'était là une erreur fatale que de placer sa confiance en autrui. J'en avais fait les frais et partais donc du principe que l'on n'est jamais mieux servi que par soi-même... Elle passa alors ses bras autour de mon cou, se collant à moi. Je plongeais mes yeux dans les siens, retenant mon souffle sans m'en rendre compte et enserrais machinalement sa taille. Laisser une chance... Il aurait été plus logique que ce soit moi qui lui demande ça, étant donné ce que je lui faisais quotidiennement subir... Mais les rôles s'inversaient de temps en temps. Qui plus est, je voyais là une occasion en or de ne pas répondre à sa question. Je n'avais pas envie de lui parler, de lui révéler quel était mon but... Ainsi, après quelques secondes d'hésitation, je l'embrassais fougueusement et passionnément.

Je ressentis aussitôt un vif désir m'envahir tout entier. Je ne lâchais pas ses lèvres, je n'en avais aucune envie. Franchement... Depuis quelques temps je passais du coq à l'âne avec elle : de la distance, puis une fusion son précédent... Le baiser ne fut rompu que par nécessité, un besoin d'air urgent pour nos poumons, mais je ne la lâchais pas pour autant et caressais doucement sa joue. Elle était magnifique ce soir, sa beauté ne toucha subitement de plein fouet... Et mon désir monta d'un cran. Sans réfléchir d'avantage, je l'embrassais une nouvelle fois, un peu moins longtemps, et fis glisser mes doigts le long de ses hanches aux courbes parfaites, à mes yeux. Je fus soudain pris d'un petit doute : après une telle discussion, avait-elle seulement envie de partager un plaisir charnel avec moi ? Et surtout, après tellement de temps, serais-je... Eh bien... A la hauteur ? Ces questions furent aussitôt chassées de mon esprit et je frôlais audacieusement le fessier de Belle avant de lui jeter un regard afin de m'assurer que je ne la forçais en rien et qu'elle était partante pour cette petite... expérience. Je supposais que le regard qu'elle me lança était positif et l'embrassais donc pour la troisième fois. En quelques minutes, à peine, je me rattrapais de tous les baisers que je ne lui avais pas donné depuis que je lui avais retrouvé et essayais de faire pardonner mes petites fautes ''conjugales''. Comme le faisaient beaucoup de couples de ma connaissance : nous allions nous réconcilier sur l'oreiller. Ce n'était pas une mauvaise méthode... Et on ne parlait pas ! Enfin... On ne se disputait pas, plutôt.

Nous n'allions tout de même pas faire ça au milieu de la salle à manger... Bien qu'il y ait un canapé, je doutais que ce soit le lieu idéal pour une ''première fois'' entre elle et moi. De plus, je n'étais pas très sportif, avec ma jambe déficiente, impossible de faire des acrobaties trop poussées. Bref ! Passons les détails... Pour faire un petit résumé, nous montâmes jusque dans l'une des chambres de mon manoir – il y en avait quatre, l'une était la chambre où nous dormions, une deuxième me servait de bureau, une était réservée pour Bae, si jamais il souhaitait revenir vivre avec moi une fois que je l'aurais retrouvé et la quatrième était libre. Une sorte de chambre d'ami qui ne serait très certainement jamais occupé puisque des amis, je n'en avais pas – et j'entrepris d'enlever ses vêtements. Il va s'en dire qu'elle fit de même pour les miens. Je laissais tomber ma canne sur le sol, accompagnée de ma cravate mauve, et nous roulâmes sur les draps frais. A ma grande surprise, je me dérouillais très rapidement et tout se passa divinement bien. J'espérais en mon fort intérieur qu'il en était de même pour Belle. Mais elle ne semblait pas trop mécontente, en tout cas, d'après ce que j'avais pu noter pendant l'acte.

Je m'étendis alors à côté de Belle, reprenant lentement une respiration à un rythme normal. Je ne me souvenais plus que c'était aussi sportif de faire ce genre de choses ! Mon esprit dériva ailleurs pendant quelques minutes. Je tournais la tête vers Belle et lui fis un sourire plus ou moins complice avant de caresser ses cheveux et de l'attirer contre moi. Nous étions bien, là... Silencieux, dans cette chambre, sans personne pour nous déranger. J'oubliais, pendant quelques secondes, qui j'étais, ce que je faisais et même ce que je cherchais. Autrement dit, pendant quelques secondes, j'oubliais Bae. Et cela me terrifia lorsque je m'en rendis compte. Je me redressais légèrement, mal à l'aise. Je ne devais surtout pas perdre mes objectifs de vue. Si c'était ça, l'amour, si c'était oublier ses priorités et faire passer ''l'être aimée'' avant tout le reste, c'était hors de question. Cependant... Je ne pouvais pas lui dire de nouvelles horreurs juste après que nous ayons fait l'amour. C'est pourquoi je continuais malgré tout de caresser sa chevelure avec douceur. Et pour une fois, je mis les pieds dans le plat avant qu'elle ne le fasse. Elle voulait que je lui parle, après tout... Très bien :

« Belle, tu as été merveilleuse... D'ailleurs, tu es toujours merveilleuse. commencer par un petit compliment – qui était vrai, par ailleurs ! – avant d'enchaîner sur des sujets plus sensibles. Mais cela ne veut pas dire que je te parlerais de mes projets pour autant. J'ai commencé ça seul, et je le finirais seul... » Ce n'était pas trop méchant, n'est-ce pas ?

Je ne savais pas exactement ce qu'elle ressentait vis-à-vis de moi à ce moment précis. De l'agacement ? De la lassitude ? En tout cas, sa main qui caressait mon torse retomba sur le matelas. Elle ne me demandait pas la lune, mais je ne pouvais accéder à sa requête. Ne plus la repousser, peut-être, à la limite... Mais j'aurais toujours tout à lui cacher. Toute ma vie, mes sentiments, mes impressions, mes projets... Je ne pouvais pas montrer tout ça au grand jour, c'était trop risqué, pour elle, pour moi, pour Bae... Oui, Bae. Je ne devais pas le perdre de vue. Pendant un instant, je l'avais oublié alors que toutes ces années durant je n'avais fait que penser à lui. Chaque minute de ma très, très longue vie d'immortel. Je poussais un discret soupir, presque inaudible, alors qu'elle s'installait contre moi, posant sa tête sur ma poitrine. Machinalement, je laissais doucement retomber ma main sur sa chevelure brune. Nous étions bien là... Mais plus les secondes passaient, plus je me refermais comme une huître... Enfin, si tant est que je me sois ouvert à un moment donné dans la soirée. Ce phénomène s'accentua lorsqu'elle fit glisser l'une de ses mains sur ma jambe blessée et qu'elle me reprocha (reprocher est un bien grand mot, certes...) de ne jamais lui avoir dit comment j'étais devenu boiteux.

C'était vrai qu'elle non plus ne m'avait pas connu avec une canne. Le Ténébreux marchait normalement, sautillant à tout va... Je soupirais, une fois encore, mais cette fois-ci avec plus d'agacement. Comme si j'avais envie de ressasser le passer et de lui parler de ma jambe ! Surtout si c'était pour qu'elle me prenne pour un lâche... Je tournais la tête vers elle et plongeais mes yeux dans les siens. Au fond, elle ne voulait pas savoir. Elle ne voulait pas savoir que j'étais parti à la guerre et que, croyant que j'allais mourir au combat et ne jamais connaître mon fils, je m'étais broyé la jambe à l'aide d'une masse. Non. Elle ne voulait pas savoir. Mon regard se durcit donc quelque peu et je fronçais légèrement les sourcils. Elle ne voulait pas que je la repousse, mais s'était mal parti.

« C'est de l'histoire ancienne. » ma voix était tranchante, comme elle l'avait été lorsque je l'avais chassé de mon château, jadis. « Et il ne sert à rien de ressasser le passé. Faites ce que je dis, pas ce que je fais ! Je ressassais le passé depuis des années, et des années, j'étais mal placé pour dire ce genre de choses. Sur ces mots, je me redressais et m'assis sur le rebord du lit, lui tournant le dos. Toute la scène de notre petit moment d'amour me revint en mémoire. Quel moment de faiblesse de ma part... Oh bien sûr, j'aimais Belle. Je l'aimais vraiment mais de toute évidence, et même après e que nous venions de faire, ... Depuis que la magie était revenue à Storybrooke, je sentais la méchanceté du Ténébreux se battre au fond de moi. C'était dans la nature du Ténébreux d'être cruel. Dans sa nature d'être seul... Qui chasse l'éternité récolte la solitude. Je ne voulais pas être méchant avec elle, au fond. C'était la dernière chose que je voulais. Mais plus je réfléchissais, plus je me murais dans cette réflexion : Belle serait mieux sans moi, sur le long terme. Peut-être allait-elle pleurer, mais elle s'en remettrait... On se remet toujours. Enfin... Pas toujours, non. J'en étais la preuve. Mais elle, elle n'était pas comme moi, elle avait d'autres personnes à aimer et un cœur assez gros pour ça. Moi non. Nous n'étions pas compatible. Prenant le ton le plus méprisant que je pouvais, je lançais donc : « Maintenant que tu as eu ce que tu voulais, tu peux partir. » je faisais allusion au sexe, bien entendu.

Je savais que j'avais de la chance de la blesser dans son amour-propre en parlant ainsi. Je la comparais presque à une traînée qui n'était venue que pour coucher avec moi alors que je savais parfaitement que c'était faux. Mais il fallait qu'elle parte... Et je ne voulais pas ouvertement lui dire de partir, alors j'étais méchant... Je n'osais même pas la regarder en face, ce que j'avais tout de même eu l'obligeance de faire au royaume des contes. Mais si je la regardais... J'allais sûrement pleurer. Et un homme ne pleure pas... Mais je n'étais pas vraiment un homme. Non, tu es un lâche, Rumplestiltskin. Un lâche et un monstre. Une fois encore, je la repoussais, alors qu'elle m'avait demandé de ne plus le faire. Je secouais doucement la tête et me rhabillais, l'air de rien. C'était tout de même plus décent de se séparer une fois vêtu... Car maintenant, j'avais une fois de plus commis l'irréparable. Pourquoi fallait-il qu'il en soit ainsi ? J'aurais pu choisir de faire des efforts... Mais je ne l'avais pas fait.

J'avais dépassé les bornes, bien entendu. J'avais cassé le lien fragile qui me reliait à Belle... Non. En vérité, je l'avais littéralement broyé entre mes mains, consciemment. Et maintenant, je n'osais pas la regarder en face. Pourquoi agissais-je ainsi ? Je l'ignorais... Parce qu'elle était quelqu'un que je chérissais de tout mon être. Malheureusement... Je ne pouvais pas permettre qu'elle reste à mes côtés. Je réalisais petit à petit que c'était dangereux pour moi, pour mes secrets, pour mon pouvoir. Que c'était dangereux, car j'en oubliais mon fils. Mais aussi, et surtout, dangereux pour elle. Il n'y avait rien de bon à fréquenter le Ténébreux. Vraiment rien de bon... Et je ne voulais pas qu'il lui arrive malheur. Elle allait être malheureuse pendant un moment, mais elle s'en remettrait, elle trouverait un homme partageant son amour, ses goûts, ses aventures et elle m'effacerait de son cœur. Penser ainsi me faisait terriblement mal. Mais c'était le mieux. Oh... C'était également terriblement égoïste de ma part, et j'en étais conscient. Car si je le faisais pour elle, je le faisais aussi beaucoup pour moi. Passons. Je me retournais face à elle lorsqu'elle prit la parole sans pour autant la regarder. Je gardais obstinément les yeux perdus dans le vague, sur le mur, hypnotisé par la tapisserie de la chambre. Si je la regardais, j'allais me sentir faible, lâche, cruel... Et ma gorge allait se nouer. Autant ne pas tenter le diable, j'étais déjà assez pathétique comme ça, inutile d'en rajouter en versant des larmes juste devant elle. Ce qui, soit dit en passant, serait vu comme pure hypocrisie puisque je la chassais, en quelque sorte.  

Elle disparut de ma vue en s'enroulant dans le drap puis revint dans la pièce complètement habillée. J'en avais profité pour faire de même... Sans remettre ma veste et ma cravate, j'avais seulement gardé ma chemise noire. Elle me jeta un regard furieux et j'eus presque peur qu'elle vienne me frapper. Elle en aurait bien été capable... Mais au lieu de ça, elle attrapa un sac et entrepris d'y ranger ses vêtements. J'avais tout gagné, décidément. Mais je ne m'attendais pas à autre chose après ce que je lui avais dit. Je venais de gâcher notre première véritable nuit d'amour ensemble... J'aurais au moins pu attendre demain. Mais non, les mots étaient sortis tous seuls. Encore une fois, je me rendais compte trop tard de mes actions. Comme lorsque j'avais lâché mon fils dans le tourbillon du haricot magique. Je commettais des actes irréparables... Je devais assumer. C'est pourquoi je regardais toujours fixement cette tapisserie, ne la regardant même pas. Je baissais les yeux sur le tee-shirt qu'elle brandit dans ma direction, menaçante et reculais d'un pas, d'un seul. Je préférais prendre des distances de sécurité, on ne savait jamais... ! Mon regard se porta sur le haut de l'armoire, après ça. Jolies portes en bois...

Belle fit quelques pas pour partir, mais, finalement, se retourna vers moi. L'espace d'une demie-seconde, j'eus la stupidité de croire qu'elle allait se calmer et essayer une nouvelle fois de revenir vers moi. Mais pas cette fois. J'avais dépassé toutes les limites imaginables. Elle m'avait pardonné trois fois déjà. Mais pas quatre. Mes chances étaient épuisées. Je baissais les yeux sur le sac qu'elle tenait dans sa main, ne souhaitant toujours pas la regarder. Son discours me brisa le cœur. Si tant est que le briser encore plus soit possible... Et si tant est que j'en ai un. Le pire était qu'elle avait raison dans tout ce qu'elle disait. Belle devait être la seule personne qui voyait le Bon en moi. Et je venais d'éradiquer cette dernière personne... Oh. Mary-Jane ne comptait pas vraiment, car tôt ou tard, elle aussi se souviendrait du méchant Rumplestiltskin, et elle ne donnerait pas de seconde chance à Mr. Gold comme elle le lui avait pourtant accordé l'autre jour, dans la bibliothèque. Ainsi donc, j'étais seul maintenant.

Belle se retourna pour partir. Je serais ma canne si fort entre mes mains que mes articulations blanchirent. Elle se ravisa une fois encore et je sursautais, ne m'attendant pas à ce qu'elle hurle de la sorte. Je redressais la tête et la fixais droit dans les yeux, par pur réflexe d'obéissance. Elle semblait hors de ses gonds. Et je n'allais pas tarder à en faire de même. Encore une fois, le Rumplestiltskin sans courage ressortait dans la conversation. J'étais un lâche dans toutes les situations à ses yeux et il aurait encore fallu que je lui raconte pour ma jambe et mon fils ? Mais oui, bien sûr, et puis quoi encore ? L'envie me démangeait de casser quelque chose. N'importe quoi... Les dents serrées, j'articulais :

« Quelle importance que je te regarde en face puisque tu vas partir ? » je brandis ma canne et fis valser la lampe de chevet sur le sol en m'avançant de quelques pas vers Belle, menaçant. « Quelle importance que je sois lâche ou courageux, hein ?! Puisque de toute évidence je ne changerais JAMAIS ! » j'étais maintenant très proche d'elle et mes traits étaient déformés par une rage qui dormait au fond de moi depuis toujours. Mes dernières paroles furent presque aussi basses qu'un murmure, mais nous étions tellement près l'un de l'autre que crier était inutile : « Je serais toujours le même... Dearie. » j'avançais ma main et touchais sa joue. Ma gorge se noua une nouvelle fois et je lui tournais le dos avant de lever le bras en l'air. Une légère volute de fumée mauve en sortie. « Maintenant va t'en, ou je te mets moi-même dehors. » Je ne pouvais m'empêcher de me demander où elle allait aller après ça... Chez des amis, sûrement. Elle devait en avoir plus d'un, c'était quelqu'un de formidable, après tout...

Cette fois, c'était fini et elle allait partir. En signe de menace, je gardais le bras levé et la main remplie d'un peu de ma magie... Juste pour la prévenir. Mais je ne doutais pas qu'elle s'en irait d'elle-même, inutile que je la mette à la porte de moi-même. De toute façon, en serais-je capable ? Je ne m'en sentais pas le courage... Je gardais le dos tourné alors qu'elle me se lançait dans une nouvelle tirade sur ma lâcheté. J'avais compris le message. J'étais un lâche, c'est entendu. Ses dernières paroles me touchèrent. Malgré tout ce que je lui faisais subir, elle continuait de m'aimer. Je l'admirais... Mais je ne dis rien. Il était trop tard pour la retenir une nouvelle fois, n'est-ce pas ? Je baissais la tête, les larmes aux yeux alors que ses pas s'éloignaient et qu'elle descendait les escaliers. Magiquement, je refermais la porte de la chambre derrière moi et restais sur place, misérable et seul comme je l'avais toujours été. Lentement, je me remis en mouvement et allais me poster devant la fenêtre. De là, j'avais une vue sur la cour où étaient garées les voitures et attendais de voir Belle quitter les lieux. J'attendis... J'attendis... Mais ne vis toujours rien. C'est alors que des sanglots montèrent jusqu'à mes oreilles. C'était Belle, bien entendu, qui d'autre ? Ne pouvait-elle pas se résoudre à quitter le manoir... ? Je tournais les talons, poussais la porte de la chambre et descendis les escaliers jusqu'à la salle à manger où je la découvris à terre, secouée de sanglots. Mon cœur se brisa, encore.

« Oh, Belle... ! » ma gorge se noua et je ne pus rien ajouter d'autre. Toute la colère que j'avais laissé paraître tout à l'heure était envolée. Je venais de la briser. Tout ceci était de ma faute... Je m'agenouillais tant bien que mal à côté d'elle, ne sachant que faire. J'avais peur de la blesser un peu plus en la prenant dans mes bras. Ou simplement en la touchant. Je tendis la main vers elle et découvris la tasse qu'elle tenait serrée entre ses doigts. LA tasse qu'elle ébréchée... Le symbole de mon amour pour elle. Un objet que je chérissais tout particulièrement. Ceci me rappela à quel point je me montrais cruel à l'égard de celle que j'aimais. Par manque de courage, comme toujours. Je posais ma canne sur le sol, à côté de moi, et mes mains sur les siennes. Je ne voulais pas qu'elle se mette dans un tel état... Encore moins devant moi... Je posais ma main sur sa joue pour relever son visage vers le mien et me forçais à plonger mes yeux dans les siens. Ce ne fut pas facile, car j'eus envie de pleurer à mon tour. Oh Belle... Oh Belle, pardon... C'était ce que j'aurais aimé lui dire. Mais à quoi bon ? Je lui fis donc un triste sourire, chargé de regrets. Il était évident que nous nous aimions l'un comme l'autre, mais nous n'étions tout simplement pas compatibles...

« Je suis désolé, Belle... Je... Je ne vaux certainement pas la peine que tu pleures. » de nature plutôt égocentrique, je n'imaginais pas qu'elle puisse pleurer pour notre histoire d'amour dans son ensemble et non pour moi. « Je ne supporte pas te voir pleurer, Belle... C'est pourquoi il faut que tu partes d'ici. Tu as assez souffert à mes côtés.» [/b] je trouvais enfin un semblant de courage pour lui dire ce que je pensais depuis un certain temps. « Tu vas sans doute souffrir, mais tu t'en remettras. Je ne suis pas fait pour toi, Belle. Vois comme je suis cruel... Je t'en prie, ne me dis pas, une fois encore, que je suis quelqu'un de bon. Cet homme-là, l'homme que j'étais il y a des années, et des années, n'est plus là... Et je ne veux pas...» risquer de te perdre comme j'ai perdu mon fils. Mais les mots s'éteignirent sur mes lèvres avant que je ne puisse finir ma phrase. «... Je ne peux pas te laisser entrer dans ma vie, Belle... Oh je suis tellement désolé...» j'étais sincère. « Tu trouveras certainement quelqu'un de mieux, dans ta vie. De bien mieux. » je lui fis un pâle sourire, essayant de cacher la douleur qui voilait mon regard. J'essuyais ses joues et attrapais la tasse ébréchée entre mes mains pour la lui reprendre. C'était tout ce qui allait me rester d'elle. Magiquement, j'ouvris la porte d'entrée, l'invitant à s'en aller. Car c'était mieux ainsi.

Le ton de sa voix était dur et tranchant. Je retirais ma main de son visage et la regardais. Dans les yeux, cette fois, même si l'envie de la fuir était présente. Je me tus à son ordre. (Ordre plus qu'une demande, en effet.). Encore une fois, il s'avérait qu'elle avait entièrement raison... Je baissais la tête à ses paroles, ne sachant que répliquer. La porte lui était ouverte et je ne souhaitais pas la retenir. Elle avait raison. Je le faisais pour moi, parce que j'étais égoïste. C'était mieux qu'elle me voit ainsi, sinon peut-être se serait-elle accroché à moi une nouvelle fois ? Je n'en savais rien et mieux valait ne pas le savoir. Je lui fis un pâle sourire et attendis qu'elle me rende nôtre tasse avant de s'en aller. Qu'elle me laisse au moins ce petit souvenir d'elle que je chérissais tant. Elle baissa les yeux dessus. C'était une jolie tasse en porcelaine dont le haut était ébréché. Car lorsque Belle avait été la gardienne de mon château, jadis, elle avait fait tomber cette tasse et l'avait quelque peu abîmée. Je ne pouvais m'empêcher de penser à la tête terrifiée qu'elle avait fait, pensant que j'allais sévèrement la punir. Je n'étais pas sans cœur à ce point-là... Peut-être que si finalement : j'avais fait bien pire que de la punir une fois avec ma magie, je lui avais brisé le cœur plusieurs fois. Alors que j'étais plongé dans ces souvenirs, elle brisa la tasse. D'un seul geste. J'écarquillais les yeux et le Non ! que je voulus crier s'étrangla dans ma gorge et aucun son ne sortit de ma bouche.

Elle venait de casser LA tasse. Notre tasse... Mes yeux ahuris fixait les deux morceaux cassés que Belle venait de mettre dans le creux de mes mains. Oh... ! Non... Je n'écoutais même pas les dernières paroles de Belle qui parlait de magie. Elle se leva et partit. La porte d'entrée claqua doucement et je restais là, agenouillé tant bien que mal sur le sol, la tasse brisée dans les mains. Mes yeux se remplirent de larmes. Pourquoi avait-il fallu qu'elle brise la tasse en plus de s'en aller ?! Quelle sale... Je relevais la tête et fixais la porte, douleur et colère se mêlant au fond de mes yeux. Je levais ma main au-dessus de la tasse pour tenter de la réparer avec ma magie, mais rien n'y fis. Elle resta inerte, brisée... J'essayais. J'essayais. Mais j'étais impuissant. Pourquoi cela ne fonctionnait-il pas ? Je fronçais les sourcils et, au bout du dixième essaie, je finis par jeter les deux morceaux qui allèrent se fracasser contre le mur, se brisant en de milliers de petits morceaux. Une larme roula sur ma joue alors que je me rendais compte de ce que je venais de faire. Même dans le monde des contes je n'avais pas osé briser cette tasse alors que, pourtant, j'avais envoyé valser tout le service à thé contre le mur... Je venais de le faire. Et elle était irréparable.

Je me levais difficilement, m'appuyant entièrement sur ma canne, comme un vieil homme fatigué. Je m'avançais jusqu'aux morceaux et les élevais magiquement jusqu'à moi afin de les envelopper délicatement dans une serviette en soi que je rangeais précieusement dans une boîte en bois posée sur une étagère. Finalement, j'y jetais un sort de protection, juste au cas où. Je m'avançais lentement jusqu'à la fenêtre du hall d'entrée pour voir que la voiture de Belle n'était plus présente dans la cour. Je baissais piteusement la tête. J'avais vraiment tout gagné : la solitude, les ténèbres, l'isolation...

« Il ne me reste plus que toi, Bae... J'espère que tu sauras me pardonner. malgré tout, je restais devant cette fenêtre jusqu'à ce que la nuit tombe, espérant peut-être la voir revenir. Mais c'était terminé : elle ne reviendrait plus, cette fois.

RP TERMINÉ ! ♥