Vingt-huit ans que nous étions plongé dans des vies qui n'étaient pas les nôtres. Vingt-huit ans que j'étais sûre de n'être qu'une étudiante un peu trop hautaine, parfois froide, la bonne fille à papa de base, tellement loin de moi, de celle que j'étais à Agrabah. Alors, apprendre que tout ça n'était qu'un mensonge m'avait quelque peu rassurée, bien que j'aurais certainement pu continuer à vivre comme ça, sans jamais savoir la vérité, même si mon comportement avait sans aucun doute blessé des gens qui m'étaient proches, des gens qui m'aimaient et que j'aimais en retour. Je savais qu'il faudrait à un moment ou un autre que je me rachetée une conduite, que je prouve à quelques personne réticentes que je suis bien plus que ce qu'ils connaissent de moi. Mon père n'était pas en reste non plus niveau conduite irrespectueuse, si éloigné de l'homme naïf et adorable que je connaissais. Mais, avant tout ça je devais le retrouver lui, Aladdin, l'homme que j'étais censé épouser avant que toute cette affaire nous emmène loin de chez nous. Lui, l'homme qui avait volé mon coeur, celui qui durant vingt-huit ans, m'avait été arraché. Je me doutais bien de la personne qui nous avaient envoyé ici. Jafar, qui d'autre ? Lui et son courage légendaire. Nous faire oublier pour mieux régner sans doute.

Nous avons passé tout ce temps à nous darder du regard dans les couloirs, sans vraiment nous parler, nous approcher, sans vraiment apprendre à nous connaitre,une fois il nous avait été donné de travailler ensemble et pourtant, nous étions restés aux politesses de bases. Étrange sentiment alors, que malgré moi je n'avais envie que d'une chose, qu'il me regarde, une attraction bien présente au-delà d'une simple "camaraderie" de classe. Comme un souvenir lointain, un sentiment de nostalgie. Je savais pertinemment que lui plus que personne attendait que je lui prouve que la Jasmine qu'il connaissait était bien là, bien présente. Je ne savais pas vraiment comment faire, devais-je aller le trouver et lui parler comme-ci de rien n'était ou alors, attendre qu'il fasse le premier pas ?

Perdu dans mes pensées je ne vis pas de suite le message sur mon portable et c'est en voulant regarder instinctivement l'heure que je le vis. Un sourire niait se dessina sur mes lèvres, il avait fait le premier pas, il pensait à moi autant que je pensais à lui. Mon coeur s'emballa d'un coup très vite lorsque je remarquais qu'il ne me restait plus que vingt minutes avant de pouvoir le retrouver. Vingt minutes pour être au mieux, faire une bonne impression. Dans un bon je me levais de mon lit et passa par la salle de bain pour me changer. L'image de ressembler à une adolescente se rendant à son premier rendez-vous s'imposa à moi et sans que je ne puisse rien y faire je laissais une certaine joie de vivre s'emparer de tout mon être, j'avais simplement hâte de le retrouver, même si je savais que rien ne serait comme avant.

D'une démarche qui se voulait assurer j'arrivais jusqu'à la Grande place et le cherchais quelques microsecondes du regard, avant de le voir enfin, assis quelques mètres plus loin sur un banc. C'était enfin le moment de vérité, ce moment que nous attentions, même sans le savoir, depuis des années maintenant. Mon coeur s'emballait au fur et à mesure que je m'approchais de lui. Les talons de mes escarpins résonnaient, me stressant un peu plus. Et plus je m'approchais, plus mes souvenirs se bousculaient dans ma tête me ramenant instantanément dans un endroit qui m'avait vue grandir, aimer, rire et pleurer. Mon palais, ma vie. Se souvenir de tout ce que nous avions perdu, laissé, oublié était très dur à gérer. Mais, avions nous le choix ? J'y étais enfin, je laissais mon regard se perdre dans le sien, comme avant. « C'est bizarre si je te dis que tu m'as manqué ? »

Alors, je lui avais manqué, un sentiment intense de joie enserra mon coeur, ça me rassurait de ne pas être la seule à ressentir tout ça, mais alors, avait-il lui aussi ressenti cette étrange attraction que je ressentais à chaque fois que je me trouvais en sa présence ? Ce sentiment intense qui me disait que malgré le fait que je devais valoir mieux que lui en apparence et bien ce n'était pas le cas et cette alchimie qui faisait que même si nous n'étions pas amis, même si nous n'avions de toute évidence rien en commun, je ne pouvais pas m'empêcher de le regarder du coin de l'oeil dans les couloirs, sourire lorsque son regard croisait le mien, par hasard ou pas. Même si nous n'avions aucun souvenir l'un de l'autre, au final j'étais attirée par lui et mon coeur me sommait d'apprendre à le connaitre. Malheureusement durant tout ce temps je n'avais pas suivi mon coeur, mais ma tête, idée stupide.

Son regard me transperça et sans que je ne puisse rien contrôler un doux sourire vint étirer mes lèvres. Son regard exprimait à cet instant tout ce qu'il ne disait pas, tout ce qu'il ressentait surement et j'aurais voulu lui rendre au centuple, mais comment faire ? Pourquoi ne m'embrassait-il pas ? Est-ce trop tôt dans nos "retrouvailles" ? Étions nous encore fiancés, toujours fait l'un pour l'autre ? Trop de questions qui tournaient dans ma tête et dont j'aimerais avoir les réponses. Un certain stress s'empara de moi. « Oui, bien sûr, marchons. » Je n'allais pas dire non, c'était tout de même stupide alors, que tout ce que j'avais attendu tout ce temps c'était ce moment, cet instant où nous serions tous les deux. Dans un geste qui se voulait complétement naturel je glissais ma main autour de son bras sans pour autant me coller complétement à lui, un rapprochement sans vraiment en être un. Juste le début d'un pas en avant, je lui laissais maintenant l'opportunité de choisir la suite.

« C'est assez déroutant. Je veux dire regarde nous, imagine si Emma n'avait pas débarqué en ville, nous serions toujours bloqués sans nos souvenirs ?  Je ne sais pas ça fait tellement bizarre. » Je n'arrivais vraiment pas à me dire que nous avions passé vingt-huit ans ici, tout ce temps sans vraiment se parler, tout ce temps sans se rendre compte que nous étions coincé dans une ville qui n'était pas chez nous, il me faudrait certainement plus que quelques jours pour pouvoir assimiler correctement les choses et pouvoir enfin accepter le fait que durant vingt-huit ans, même si je ne m'en était pas rendu compte, j'avais été éloigné de l'amour de ma vie. Perdre autant de temps, quel gâchis. « Tu sais, je voudrais m'excuser pour la fille que j'étais durant les vingt-huit dernières années. Ce n'était pas vraiment moi, j'espère que tu le sais ? Je suis toujours moi, tu sais la fille dont tu es tombé amoureux et qui est dingue de toi. » Il était certainement la seule personne de cette ville a qui je voulais faire des excuses, à qui je devais vraiment de faire des excuses. Je savais pertinemment qu'il n'oublierait certainement pas la peste sans coeur que j'avais été durant tout ce temps, mais il pardonnerait surement, parce que malgré tout, ce n'était pas moi et au fond de lui il devait le savoir, mieux que personne.

« Agrabah me manque, je n'arrête pas d'y penser depuis que la malédiction a été brisée, j'espère que tout ce passe bien là-bas, mais j'ai peur de ce que l'on va retrouver si jamais nous arrivons à rentrer. » Étant donné que mon père et Aladdin étaient là, je ne me faisais pas tellement d'illusion sur la personne qui régnait maintenant sur le palais de mon père. Jafar. Il avait atteint son but. Mon pays me manquait, ma vie d'avant ainsi que Rajah. Je n'avais pas eu de nouvelles de lui durant tout ce temps, j'espérais simplement qu'il aille bien et je regrettais vraiment qu'il ne soit pas ici avec nous, bien que l'imaginer en être humain était assez étrange. Même si du côté de Abu c'était plutôt amusant. J'avais eu la chance de le croiser quelques fois et il n'était pas tellement différent de sa forme originale, assez drôle et futé.

Je me demandais pourquoi nous avions été envoyés ici, alors que d'autre était encore chez nous, même si la réponse restait plus qu'évidente, une seule personne pouvait être derrière tout ça, mais pourquoi ? Au moins Ali semblait croire que tout ce passait bien sans nous et dans un sens ça me rassurait, je voulais vraiment croire qu'il avait raison, que tout ce passait bien et que rien n'avait changé en notre absence, mais c'était vraiment compliqué, j'étais sans doute bien trop inquiète pour l'instant. « J'aime ton optimisme. » Un petit sourire étira mes lèvres, tandis que nous continuions à avancer, sans but précis, sans vraiment savoir où nous allions, mais le plus important c'était que maintenant nous étions ensemble le reste comptait peu, même si le sujet "Agrabah" était plus présent que jamais. Je me doutais bien que les gens là-bas s'en sortaient bien, du moins je l'espérais, même si je ressentais tout de même une pointe d'appréhension, seulement aujourd'hui je devais profiter de ce que j'avais et de ce moment privilégié. Nous attendaient-ils vraiment ? Je l'espérais.

« Je te fais confiance pour ça, je sais que tu nous ramèneras à la maison. » C'est une des choses que j'aimais le plus chez Ali, il avait ce petit truc, cette petite phrase qui me remontait le moral et me faisait sourire à coup sûr. Et sans que je ne vois le coup venir, il déposa le plus délicatement du monde, ses lèvres sur les miennes. Mon coeur loupa un battement et un fourmillement se fit ressentir le long de ma colonne vertébrale. Ce baiser était une évidence, comme si, nos lèvres étaient simplement faites pour être ensemble, que nous étions juste fait l'un pour l'autre. Même si c'était une telle évidence, du moins pour moi. « C'était pour quoi ça ? » Avais-je vraiment besoin d'une raison pour être embrassé par l'homme de ma vie ? Non, bien sûr que non, mais il m'avait semblé qu'il m'en voulait au moins un peu pour mon comportement de ses dernières années, alors j'étais un peu surprise de la tournure que prenait cette conversation. Enfin, agréablement surprise bien entendu. Il m'avait tellement manqué, même si je ne m'en était pas rendu compte au cours des dernières années, c'est comme si depuis notre réveil, j'avais pris vingt-huit ans de manque d'un coup Une sensation assez étrange.

« Au fait, j'ai vu Abu. C'est tellement étrange de le voir...comme ça. Je ne l'aurais surement pas imaginé comme ça, quoi que au final je ne l'imaginais pas du tout en être humain. » Que dire de la surprise en découvrant que le meilleur ami d'Ali, qui était d'ordinaire un singe était maintenant un humain. Je me demandais instantanément à quoi aurait pu ressembler Rajah si jamais il avait été envoyé avec nous. Quel genre d'être humain il aurait pu être ?! Une question qui de toute façon n'avait pas lieu d'être étant donné qu'il n'était pas là. Nous devions avant tout nous concentrer sur le plus important, comment rentrer, comment gérer ce que nous étions maintenant et ce que nous avions fait ces dernières années et surtout ne pas cesser de s'aimer, même si ça me semblait impossible, du moins, nous étions sur la bonne voie pour continuer ce que nous avions laissé à Agrabah, sans parler du mariage évidemment. Ici, ce n'était en rien une obligation et je voulais simplement profiter de ses petits moments à deux sans avoir la pression de mon père. Profiter de notre amour, sans que nous soyons obligés de nous justifier sur nos moindres faits et gestes, avoir simplement un peu de liberté avec l'homme dont j'étais amoureuse.