Aux vues de mon caractère ténébreux, l'on pourrait croire que j'ai vécu une enfance difficile et que je suis passé par de nombreuses épreuves qui m'auraient forgé ainsi tel que je suis. C'est hélas faux. Pour tout dire, je suis né premier et unique fils d'un comte anglais, Sir de Girsborne, mal vu par sa majesté le roi Richard, et adoré par sa seigneurie le prince Jean. Aussi, j'ai toujours vécu dans un luxe pesant qui ne faisait que me ravir à chaque instant. Et pour tout dire, je n'ai jamais eu à me plaindre de ma vie, choyé par ma mère et éduqué par mon père. Peu importe les détails, je n'ai jamais passé une enfance solitaire malgré mon statut de fils sans frères ou sœurs. Sans doute était-ce dû à mon cousin, que dis-je, mon meilleur ami à cette époque. Robin et moi avons passé notre jeunesse à nous amuser, jouer des autres et profiter de cette innocence qui nous caractérisait. Nous n'avions que faire des entreprises des adultes et gens de la Cour, et peu nous importait ces Croisades incessantes qui avaient vu partir notre bon roi Richard. Notre bon roi Richard... très tôt, j'ai apprit à préférer le frère cadet de la royauté, comme mon père avant moi, et si leur affaire ne m'intéressaient pas, je fus quand même très tôt plongé dans cette ambiance pesante de noblesse. Elle ne me déplaisait pas, mais j'aurais préféré qu'on me laisse le choix.

J'ai toujours vécu à Nottingham, et j'ai rarement voyagé. Si mon père était grand seigneur, je ne m'estimais pas le moins du monde comme son égal. Il était pour moi le symbole même de la noblesse, un exemple parfait à suivre, il était mon père, tout simplement. Et tout ordre qu'il me donnait, je l'exécutais, par seul souci de ne jamais le décevoir. C'est ce qui expliqua que le jour de mes 16 ans, je fus fiancé à une enfant de seulement 12. Elle n'était pas n'importe qui, il s'agissait de Marianne, la nièce adoré du roi Richard. Dieu sait par quel moyen mon père avait réussi à obtenir ce mariage, mais les faits étaient là, et conscient de leurs importance, j'acceptais sans hésitation les fiançailles et le mariage à venir dans les 4 ans à venir. Que les choses soient claires, à cette époque, rien ne me prédestinait à épouser Marianne, et je n'avais jusque là jamais éprouvé de sentiment amoureux pour personne. En tout honnêteté, il me fallut quelques années avant que je ne puisse ressentir autre chose qu'une affection fraternel à son égard, mais lorsqu'elle vint s'établir à Nottingham, il fut certain pour moi que les choses n'en resteraient pas là. Elle était belle, douce, esseulée, sans parents et vendue comme un objet à une famille qu'elle ne connaissait pas le moins du monde. Quoiqu'en puisse dire d'autre, je n'étais pas sans cœur, et c'est ce qui causa ma perte lorsqu'un jour je me rendis pleinement compte de l'amour que je portais à la jeune femme.

Deux causes me révélèrent au grand jour cet état de fait : une jalousie maladive, et mon cousin Robin. Je savais qu'il s'était longtemps moqué de Marianne, refusant de réfuter quelques préjugé sur une dame de la Cour, tout en plaignant son cousin de se laisser embarquer dans les joies du mariage. J'avais laissé dire, et paradoxalement, je ne pouvais qu'approuver. Pourtant, j'aurais du remarquer plus tôt le changement qui s'était opéré chez mon cousin. Le regard n'était plus le même, ses attentions envers Marianne étaient différentes. Et peu à peu, j'en ressentis une douleur vaguement déchirante, jusqu'à ce que finalement, j'en eu le cœur brisé. Car ce regard qu'avait Robin, il se reflétait dans celui de ma fiancée. Je n'étais pas naïf ni idiot, et j'eus tôt fait de comprendre ce qui se tramait. J'ai commencé à m'éloigner de mon cousin, ressentir pour lui une rancœur dévorante, et pour Marianne un amour sans borne. Si j'étais prêt à tout pour elle, j'étais prêt à tuer pour la garder. Et à mesure que les fiançailles s'approchaient, je perdais patience de la voir s'éloigner de moi. Je refusais tout bonnement de la partager. Colère, haine, violence... Robin n'avait pas le droit de la mériter, elle était à moi, elle m'était promise ! Alors pourquoi... pourquoi ne cessait-elle pas de le regarder ! Pourquoi avait-il fallu que tous les deux continuent ?!

Je venais tout juste d'avoir 18 ans quand le Roi Richard parti en croisade sainte et que son frère le prince Jean prit le pouvoir. C'est moi qui conseilla à père de se rapprocher encore plus de lui, de devenir son plus proche ami pour le seconder et garder l'Angleterre sous sa coupe. Mais mes projets étaient d'ordre bien plus personnels, puisque ma seule envie était de me venger de mon cousin, de lui pourrir la vie, la détruire, le faire devenir un moins que rien... Oui, le briser définitivement, puisqu'il avait osé s'approcher de Marianne. Je devins chasseur de prime, et par ailleurs, le second du shérif de Nottingham, grand ami de mon père et le mien aussi. Nous travaillons ensemble, je lui ramenait les têtes mises à prix, il les pendait. À mesure que j'avançais sur ce chemin, je savais que ma réputation s'envenimait, jusqu'à ce qu'on en vienne à craindre le fils de Gisborne plutôt que son père. Cela ne faisait que rehausser ma fierté, mais rien qui ne puisse atténuer ma haine viscérale envers mon cher cousin.

Mais ce que j'avais tant attendu c'était enfin mis en marche, lorsque son père, le Seigneur de Loksey, énonça publiquement son refus d'obéissance au prince Jean. Persuadé que sa famille le suivrait, je savais que Robin finirait lui aussi par déchoir et perdre peut être la vie. Tout ce qui m'importait, c'était qu'il souffre. Ma jalousie m'avait poussé à m'en prendre à ma propre famille, sans peur de leur regard ni de celui de mes proches. Tant que Marianne restait près de moi, cela me suffisait. Mais hélas, elle aussi s'éloignait, depuis trop longtemps. Sans s'en rendre compte, c'était elle qui me poussait dans mon délire de rancune contre mon propre cousin. Cependant à mes yeux, tout était la faute de Robin. Sa faute, uniquement SA faute. Il avait cherché la guerre, il l'avait trouvé.

L'exécution du père de Robin eut lieu en place public, et c'est moi qui suit venu arrêter mon oncle dans sa propre demeure pour le mener à l'échafaud. Personne, non personne ne pouvait comprendre mon sentiment de jouissance face au regard dévasté de mon cousin. Et il dut fuir, partir, ne jamais revenir. Moi, je le chasserais, et terminerais et lui coupant la tête. Enfin, ce serait la fin de ce voleur et ce moins que rien que j'avais cru mon ami, mon cousin, presque un frère à qui j'avais confié tant de chose et de sentiment. Aujourd'hui, il n'était plus que mon ennemi.

Alors qu'il fuyait dans la forêt pour le restant de ses jours, enfin débarrassé de ce gêneur, je tendais de récupérer l'attention de Marianne. J'ai cru, pendant quelques mois qu'elle m'était totalement revenue, que l'amour qu'elle me montrait était sincère. J'avais tord, et la douleur me saisit quand je compris une nouvelle fois qu'elle ne pensait point à moi mais un autre. Toujours le même... oh oui, elle n'avait pas oublié Robin. Je voyais et savais qu'elle l'aimait. Mais... je ne pouvais lui laisser. Jamais. Elle l'avait aidé. Elle m'avait TRAHI. Et ça, non, je n'ai pu lui pardonner de tromper ainsi sa promesse de fiançailles avec moi. Alors ma chasse à redoublé contre lui. De nombreuse fois je suis parvenu à le capturer, mais à chaque fois il trouvait le moyen de s'enfuir, s'échapper et éviter la corde au cou.

Disparue, envolée. Elle n'était plus là quand je suis revenu au palais. Elle c'était tout bonnement enfuie à son tour. Marianne l'avait définitivement abandonné, reniant sa promesse envers moi, trahissant tout ce que nous avions vécu, et pour quoi ? Elle ne m'avait jamais aimé, je le sais maintenant, et j'appris de source sûre qu'elle était retourné auprès de son Robin...

Dans la vie, de nombreuses choses peuvent vous inciter à changer. Un passé tortueux, des évènements tragiques... dans mon cas, j'ai eu le cœur brisé, deux fois. Par mon cousin que j'ai adoré, et la femme que j'ai plus que tout aimé. Et depuis, je n'ai ressenti que haine et rancœur pour eux et pour le monde entier.

Une malédiction. Personne ne l’avait vraiment vu venir, puisque la source était loin, bien loin de Nottingham. Et elle l’avait touché, ainsi que le monde entier. Ce n’était plus Guy de Gisborne, mais Alban Sullivan, un nom bien commun, avec une vie toute aussi commune, sans aucune particularité. De ces faux souvenirs dont il était le possesseur, il se souvenait d’avoir vécu ailleurs avant Storybrooke. Né loin des States, c’est en Angleterre, son véritable pays natal qu’il vu le jour. Et de fil en aiguille, suivant ses parents, il trouva un point d’ancrage dans la petite ville. C’est ce que lui rappelle chaque jour cette mémoire factice mêlée à celle du passé… aussi curieux que cela soit, ces deux vies avaient nombres de points communs. Une enfance riche et heureuse, malgré quelques absences parentales, il compensait celles-ci avec sa petite sœur et son petit frère. Intelligent, attendu pour reprendre la suite de ses parents, Alban c’est toujours battu pour ne jamais les décevoir. Il passa sa scolarité avec brio et sérieux, et décrocha son diplôme, aussi simplement que cela.

Si l’on ne s’attardait que sur ces simples détails, il semblait bien en effet que la vie d’Alban Sullivan était des plus ennuyeuses. Pourtant en parallèle, ce jeune homme si brillant et serviable cachait un vice, comme l’on peut en attendre de tout être humain. Au-delà du grand frère protecteur et du parfait fils, il était un parfait petit con en ce qui concernait ses relations amoureuses. Ah, qu’il les enchaina les petites conquêtes, elles se suivirent et ne se ressemblaient pas. Et toujours il finissait par se lasser et aller voir ailleurs s’il y était. Plus qu’un charmeur, c’était un trompeur, et qui aimait ça.

Oh, mais les choses en viennent toujours à changer, pas vrai ? Car il faut bien faire un jour la rencontre de toute une vie. Jamais Alban ne compris ce lien qui l’unissait à Mary-Jane. Il l’aimait, elle était la seule qu’il n’avait jamais trompé, et pourtant avec elle rien n’allait jamais. Si ce n’était pas elle qui le quittait, il lui renvoyait la balle. Cela faisait longtemps qu’il avait rencontré la jeune femme, longtemps qu’il sortait avec elle et tentait de recoller les morceaux. Si seulement il avait su la réalité, la vrai, celle qui l’unissait par-delà un passé, un autre monde, une autre vie. Elle n’était autre que Marianne, la belle Marianne, celle qu’au fond de lui Guy avait toujours aimé jusqu’à s’en damner. Mais ça, Alban l’ignorait.
C’est très tôt qu’ils se sont rencontrés. Jeunesse, des enfants encore, ou au moins des adolescents. Il fallut un temps pour que tous deux en viennent à entretenir une relation intime. Celle qui dura encore pendant de longues années, entrecoupées de pause et de passade. Non vraiment, avec MJ, tout était plus… compliqué.

Et tout devint clair. Très clair. Trop clair. De la magie, et des souvenirs d’un passé qu’à la réflexion il aurait aimé oublier. Car sans doute trop douloureux, trop haineux. Qui est Alban ? Qui est Guy ? Où va l’un ? Où s’arrête l’autre ? Perdu, oui c’était le mot. Plus encore lorsqu’il prend conscience de ce monde qui l’entoure, de cette vie qu’il avait vécu, de son amour pour MJ, celui pour Marianne s’y mêlant, mais aussi la haine, la jalousie, la possessivité. Tout cela, c’était lui. Et il ne pouvait pas le changer. Mais il ne voulait pas à nouveau perdre la femme de son cœur, et était prêt à recommencer pour ne pas la laisser s’échapper. Puisque Robin n’était pas là, il avait toutes les chances de son côté. Et si celui-ci devait revenir, il était prêt à le tuer, comme il l’aurait fait par le passé…