« Je me suis occupée d'elle dès le départ, même à ses premières représentations. C'était une très belle enfant et maintenant, c'est une très belle femme. Je la coiffe et l'habille avant chaque apparition. Elle a beaucoup de talent et un bel avenir, mais ça ne l'empêche pas d'être aimable avec moi, cela fait tellement longtemps que nous nous connaissons. Assez souvent, des gens de toutes origines venaient lui apporter des fleurs, des sucreries et toutes sortes de choses, parfois accompagnés de lettres. Je rangeais la loge après une représentation quand on apporta le plus grand bouquet que j'ai jamais vu. Des fleurs multicolores et une petite carte. Elle est venue me trouver un peu après en me demandant si elle devant accepter l'invitation. Apparemment, un prince lui avait demandé de l'accompagner à un dîner. Je lui ai répondu que ce n'était pas le genre de chose qu'on se voit proposer souvent. Elle a sourit et elle a été écrire une note qu'elle lui a fait porter. Le prince est venu régulièrement après ça. Toujours en apportant des fleurs. Il était plutôt bel homme, ça oui et toujours très propre sur lui. »

Martha, habilleuse du pays de Londres.

« J'étais sur le point de fermer boutique. Ils sont entrés, main dans la main, habillés de la plus exquise façon. Le jeune homme avait l'air un peu mal à l'aise devant l'objectif. Il tirait sur le bas de sa veste, ça faisait des plis affreux. La demoiselle était à l'aise, je pense qu'elle avait l'habitude de cet exercice. Il faut rester immobile un certain temps pour que l'image soit nette. Au final, la photo fut une réussite. Le jeune homme avait toujours l'air un peu gêné, peut-être de se voir ainsi gravé éternellement sur du papier. Ils ont payé plus que le tarif habituel pour avoir retardé la fermeture de la boutique et le jeune homme est revenu quelques jours plus tard pour me demander de ne pas parler de leur visite à qui que ce soit. Il m'a payé une deuxième fois pour s'assurer que je ne dirai rien. Mais ça fait tellement longtemps maintenant, ça n'a plus vraiment d'importance. »

Jack Maldosh, photographe à la retraite.

« Les murs sont plutôt fins dans le quartier. D'habitude, elle est plutôt discrète, parfois un peu de musique mais ce n'est pas vraiment dérangeant. Mais ce soir-là, je l'ai entendu hurler à quelqu'un de s'en aller. Elle avait l'air furieuse. Je suis venue prendre de ses nouvelles le lendemain, elle avait l'air complètement abattue. J'ai fini par comprendre entre deux sanglots qu'elle avait fréquenté un homme pendant un long moment et qu'il l'avait laissé tombée parce qu'elle n'était pas du même niveau social que lui. Après ça, elle n'a plus été se produire sur scène. Elle a continué à donner des concerts privés et ça avait l'air de lui convenir. Elle a recommencé à écouter de la musique de temps en temps et tout est redevenu normal. »

Janett Collins, voisine de sa maison en banlieue.

« Madame Adler avait pris rendez-vous pour une affaire juridique d'ordre fiscal, il me semble. Il faut dire qu'elle avait une petite fortune à gérer. Elle aimait être informée au mieux, c'est pourquoi elle venait souvent demander conseil à Monsieur. Bien qu'il me sembla rapidement que cela n'était pas que professionnel. Elle l'appréciait beaucoup. Je pense qu'ils ont été quelques fois au restaurant, là aussi j'hésite à affirmer qu'il s'agissait uniquement d'affaires d'argent. Ils allaient bien ensemble tous les deux et Monsieur était célibataire. »

Une secrétaire de Maître Godfrey Norton.

« Quand j'ai appris la nouvelle, je me suis sentie obligée de la prévenir. Cela aurait pu me faire perdre mon emploi, si on l'avait appris. Mais je ne pouvais pas la laisser dans l'ignorance. Alors que je conduisais le carrosse de Sa Majesté le Prince, je l'ai entendu parler avec un ami de Mademoiselle Irène et de l'intervention d'un certain Sherlock Holmes. Je me tiens un peu informé de ce qu'il se passe, vous voyez. Alors je suis allé jusque chez elle et je lui ai glissé une lettre sous la porte, pour lui dire de se méfier de cet enquêteur. Je ne sais pas trop ce que Sa Majesté voulait apprendre d'elle en engageant un détective privé. Mais elle ne méritait pas d'être espionnée après la manière dont il l'avait abandonnée. »

Un des employés du prince.

« Un mariage en petit comité, cela m'était déjà arrivé d'en célébrer. Mais un mariage sans famille, ni amis, ni témoins, ça jamais ! La mariée n'avait pas pris la peine de s'habiller pour la circonstance... Incroyable ! C'était une sorte d'urgence, apparemment. Mais il fallait au moins un témoin pour signer ! Heureusement, un quidam qui se baladait dans l'église à accepté de se joindre à la cérémonie. Ont été unis mari et femme Godfrey Norton et Irène, née Adler. »

Matthieu, homme de foi.

« Par deux fois, ma demeure avait été cambriolée. Par trois fois, lors d'un voyage, mes bagages avaient été volés. Le tout en l'espace d'un mois. Oh, je savais bien ce qu'ils cherchaient. Mais je savais aussi que la photographie était trop bien cachée pour que quiconque ne pense à aller la chercher où elle reposait. Le mariage fut un peu rapide, mais cela n'avait aucune importance. J'étais désormais madame Norton, épouse d'un homme gentil et aimant.
Lorsqu'en descendant de ma calèche, je fus prise dans une sorte d'émeute, il me sembla évident qu'il s'agissait d'un autre de ses tentatives. Heureusement pour moi, un homme d'église s'interposa entre moi et les voyous. Malheureusement pour lui, qui se pris un mauvais coup et commença à saigner tant et plus et fini par s'évanouir. Je me dépêchais de rentrer chez moi mais on m’interpella depuis la rue. L'homme serait mort. Non, il respire encore. Je demanda à ce qu'on le transporte dans le salon pour qu'il puisse se remettre sereinement de ses émotions. Il me remercia poliment pour l'accueil puis fut pris d'un nouveau vertige. Pensant que de l'air frais lui ferait du bien, je demanda à Sarah d'ouvrir la fenêtre et de nous apporter du thé.
Soudain, il y eut de la fumée dans la pièce et j'entendis des voix à l'extérieur crier au feu. Un peu abrutie, peut-être, par l’enchaînement des événements, je courus vérifier que ce n'était pas ma maison qui brûlait, qui la photographie n'avait rien. En sortant de l'endroit où elle était cachée, je me rendis compte de ma bêtise. Tout cela n'avait été qu'une immense ruse visant à me faire révéler l'endroit où j'avais mis mon bien. J'en fus certaine une fois revenue dans le salon. Le prêtre avait disparu. Il devait s'agir de Sherlock Holmes, le brillant détective dont on m'avait dit de me méfier peu de temps auparavant.
Décidant qu'il fallait que j'en aie le coeur net, je demanda à Sarah de m'apporter mes vêtements de marche : des habits masculins qui suffisait, avec quelques autres artifices que j'avais appris de la scène, à me faire passer pour un jeune homme. La ville était tellement plus commode lorsqu'on ne porte pas de jupons. Connaissant l'adresse du détective, je pris des raccourcis pour arriver dans la rue où il habitait le plus rapidement possible. Et là, à deux pas du 221B, se promenait le prêtre, le nez toujours un peu rougit par ce que était tout sauf du sang, à n'en plus douter, mais qui y ressemblait assez pour que je m'y sois faite prendre. Accompagné d'un homme qui s'était lui aussi trouvé dans la rue au moment de l'incident.

"Bonsoir, monsieur Sherlock Holmes !" le hélais-je, prenant une voix masculine. Les deux hommes levèrent les yeux et celui déguisé en prêtre hochait la tête, avant de chercher ses clefs pour rentrer chez lui. J'avais donc la preuve que j'avais été piégée et je rentra chez moi le plus vite possible, envoya Sarah prévenir Godfrey que nous quittions le pays immédiatement. Nul doute qu'il allait revenir pour prendre ce qu'il cherchait. Cette photo était ma seule garantie que le prince me laisserai tranquille et je ne pouvais l'abandonner. A la hâte, je fis mes valises, entassant robes et bijoux, partitions et livres. La photo dans son cadre bien cachée entre deux toilettes. Je trouvais un peu cruel que tous les efforts du détective ne le mène à rien. Alors, dans l'ancienne cache, je posais une lettre destinée à Holmes et une photo de moi en robe du soir. Au moins, ils auraient une photo, simplement pas celle souhaitée. Nous prirent le bateau dans la nuit et ne remirent jamais les pieds à Londres. »

Irène Norton.

Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle arriva à Storybrook à contre-coeur. Abandonnant la gloire qu'elle avait connu à New-York, elle n'avait pas d'autre choix. Son mari était jaloux de ses admirateurs et menaçait de la quitter. Alors les valises avaient été faites rapidement, les rendez-vous annulés et ils étaient partis pour ce qu'elle pensait être une vie plus paisible. Leur nouvelle maison était grande et installée dans un beau quartier, tout était supposé bien se passer. Elle commença à donner des cours de chant, déjà un peu nostalgique des planches. Son mari s'installa en ville comme avocat et travaillait beaucoup. Il était souvent absent. C'est amusant quand on pense que c'était ce qu'il lui reprochait à l'époque. Elle finit par apprendre qu'il la trompait, lui qui avait tellement tempêté pour qu'elle s'éloigne du monde qui était le sien et des hommes qu'il voyait comme une menace. Elle demanda le divorce sans lui en donner la raison et batailla pour garder la maison. Il alla s'installer ailleurs sans quitter la ville cependant.

Elle sombra dans la dépression. Pourquoi cela lui était-il arrivé à elle ? Jamais elle n'avait trahi sa confiance à lui, jamais elle n'avait céder aux avances qui lui avait été faites. Elle l'avait aimé franchement, et voilà le résultat. Elle se disait qu'il était trop tard pour recommencer à chanter, l'arrêt dans sa carrière ayant duré trop longtemps. Le public l'avait oublié, Adeline en était persuadée. Elle resta donc à Storybrook, avec ses élèves pour seule compagnie, dans sa demeure maintenant trop grande. Elle voulait sortir de sa torpeur mais n'avait pas la force d'y arriver. Elle se sentait vide, comme si une partie d'elle-même était manquante. Elle passait son temps à errer chez elle, faisant livrer ce dont elle avait besoin. Elle pleurait parfois pendant des heures, sans que rien ne soit arrivé pour provoquer cela. Chaque jour semblait le même que le précédent et elle aurait été incapable de dire depuis combien de temps elle était dans cet état.

Une nuit, elle fit un rêve étrange. Un curé ensanglanté était assis dans son salon. Ce n'était pas vraiment son salon en vérité, mais elle savait qu'elle était chez elle. Il ne dit rien, mais il la dévisagea et elle eut l'impression qu'il lisait en elle ses pensées, ses secrets, ses souvenirs. Puis en l'observant en retour, elle sut qu'il cachait des choses lui aussi, qu'il camouflait sa véritable identité. Le matin venu, elle ne pouvait plus oublier son visage. Il la hantait. Elle était persuadée de le connaître, de l'avoir déjà vu quelque part. Mais où ?